Trois journées de sports dédiées aux femmes en situation de handicap : du 27 au 29 mars prochain à Yaoundé, Diversity Days se mobilise en faveur des femmes en situation de handicap. Quelle est la particularité d’un tel projet dans un contexte où le sport est autant une affaire d’hommes que de femmes ?
Le 8 mars, le monde entier vibre, comme chaque année, au son de cloche de la Journée Internationale des droits des femmes. L’occasion est venue, pour la société civile et les gouvernants, d’organiser des activités multiples et diverses pour célébrer les femmes. Il est question ici de mettre en évidence les qualités, les prouesses et les compétences qui montrent la capacité des femmes à se distinguer, à la fois dans les activités les plus pointues mais également celles du quotidien. Et le sport n’est évidemment pas en reste.
À l’occasion, on célèbre les réussites sociales, les victoires et même les échecs pouvant conduire aux leçons. Tout est mis en exergue ici pour montrer que les femmes et les jeunes filles ne doivent plus être considérées comme des apatrides de la société. Elles ne doivent plus être vouées aux gémonies et se voir confier les seconds rôles.
Mais ce qui est encore plus captivant, c’est le fait pour une catégorie de femmes de montrer ces prouesses. Les femmes en situation de handicap sont ainsi mises à l’épreuve. Si nous pouvons décrier la marginalisation des personnes en situation de handicap en général, celle-ci reste encore plus préoccupante quand il s’agit des femmes.
Les débuts du handisport au Cameroun : des initiatives privées
Le mouvement sportif du sport pour personnes en situation de handicap en général est pour le moment une affaire du gouvernement. La Fédération Camerounaise de Sport pour Handicapés (FECASH) créée à Douala en 1998 est la première organisation sportive sous une initiative privée. Cette fédération regroupe quatre associations des personnes handicapées qui sont : Handisport Cameroun, Association Sportive des Aveugles et Malvoyants du Cameroun (ASAMC), Ligue Nationale des Sports pour Sourds au Cameroun (LINASCAM), Special Olympics (déficients mentaux).
Une initiative privée qui met en ébullition l’engouement des bonnes volontés qui souhaitent s’y investir. On peut citer l’exemple du Docteur Abeng Mbozo’o qui a mis à la disposition de cette fédération des installations personnelles.
Cette fédération, avec le temps, n’aura pas fait long feu pour des raisons évidentes d’autonomie financière. Les sponsors ainsi que le gouvernement ne s’y intéressent malheureusement pas. Cette situation préoccupante morose restera ainsi pendant des années. Ce qui n’empêchera pas les équipes handicapées de remporter des victoires lors des compétitions nationales ou internationales.
Les pouvoirs publics s’en mêlent
Cependant, en 2011, le gouvernement revient sur ses pas et organise le mouvement handisport au Cameroun. Pour animer le mouvement para-sportif, le gouvernement a mis en place des fédérations dédiées gérées par des fonctionnaires. Il crée donc le Comité National Paralympique Camerounais. Il comprend quatre fédérations. La FECASDEP pour les déficients physiques, la FECASDEV pour les déficients visuels, la FECASDI pour les déficients intellectuels et la FECASSO pour les déficients auditifs. Les fédérations regroupent les sports masculins comme féminin. L’objectif était de combler un vide sidéral dans ce domaine. Par la suite, comment ce mouvement a-t-il évolué ?
Le mouvement handisport évolue au gré des pouvoirs publics. Aucune initiative privée n’ose prendre l’engagement de s’y investir. Pour quelle raison ? Personne ne peut le savoir pour le moment. Les handisport sont jusqu’ici considérés comme des activités à caractère social. Ils ne mobilisent pas (encore) des sponsors au Cameroun comme les sports pour personnes valides. Ils restent donc aux crochets des pouvoirs publics. Dans ces conditions, il devient difficile de donner au handisport des actualités régulières qui font vivre le mouvement sportif, comme les Jeux paralympiques de Paris 2024.
Trois jours pour le handisport féminin
Cette initiative privée, créée en 2022, est une idée originale des personnes de poigne et avec la collaboration de Yves Wansi, Achille Gwem et Veerle Jensen Jacquemin. Elle est également soutenue par S.E Pauline – Irene Ngene, Ministre des affaires sociales, l’Ambassade d’Afrique du Sud au Cameroun, Unesco, l’AMT. June Langa et Karen Coustère parrainent cette troisième édition. Elle concerne les sports féminins pour les personnes en situation de handicap.
Pendant trois jours, les femmes en situation de handicap, vont démontrer leur prouesse en sports les plus variés. L’évènement a fixé trois objectifs :
- D’abord, c’est une période de divertissement. Les femmes viendront partager des moments de joie et de réjouissance à se retrouver ensemble autour des activités sportives. Ce n’est pas souvent le cas au cours des rencontres habituelles et régulières dans le cadre des activités associatives. Les rencontres sportives ne sont pas des activités quotidiennes comme chez les personnes valides qui sont habituées à taper sur le ballon presque chaque semaine, si ce n’est tous les jours.
- Ensuite, il faut vulgariser le handisport. Les difficultés liées aux infrastructures sont généralement les motifs du sous-développement dans ce domaine. Il faut donc un investissement conséquent pour accroître la motivation et susciter les passions. La pratique quotidienne du handisport est une question de politique de gestion de sports avant l’intérêt des initiatives privées. Diversity Days est donc l’occasion de susciter cet intérêt
- Enfin, le projet est une mise en vitrine d’un domaine de sport que les partenaires ne visent pas beaucoup. Les raisons peuvent être liées au fait que les pouvoirs publics qui tardent à y donner un coup de fouet. Le secteur privé ne pourra être vraiment motivé que par les injonctions des pouvoirs publics. Le niveau approximatif du développement du handisport montre malheureusement que ce n’est pas encore le cas.
Le programme Diversity Days
Pendant ces trois jours d’activités handisport réservées aux femmes et filles en situation de handicap, l’accent ne sera pas mius exclusivement sur la pratique du sport. Le 27 mars, des experts animeront une conférence-débat dans les locaux de l’UNESCO à Yaoundé. Les intervenants évoqueront le rôle du sport dans l’inclusion, l’éducation, l’émancipation et l’intégration sociale.
Lors des deux jours suivants, sept disciplines handisports sont à l’ordre du jour : Cécifoot, Basket-fauteuil, Tennis-fauteuil, Goalball, Taekwondo, Mouv and speak et l’ascension du Mont Messa (1025 mètres).
En conclusion, le Diversity Days porte donc quatre enjeux : sensibilisation, autonomie, employabilité et lieux de sports. Le sport pour handicapés en général et pour les femmes et filles en particulier est un outil d’inclusion à quatre niveaux : la socialisation, l’autonomie, l’éducation et la vulgarisation.
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