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Pour une histoire de passeport biométrique…

Mon mariage avec la famille Mondoblog de RFI commence le 9 septembre 2013, date à laquelle je reçois une fiche de candidature que je remplis et envoie immédiatement. Il serait peut-être prétentieux de dire ici que j’attachais beaucoup d’importance à ce « concours ». J’étais loin d’imaginer ce que cela pouvait représenter pour moi d’appartenir à cette grande famille des blogueurs francophones. Même un tour dans la file d’actualité du site de Mondoblog ne changeait rien à cette posture, en quelque sorte, naïve. C’est le 7 octobre 2013 que le message de l’équipe Mondoblog RFI m’annonce que j’ai été admis à faire partie de la famille. Du coup, un réel enthousiasme dont je n’arrive pas toujours à percevoir l’origine m’envahit tout d’un coup. Il faut aussi dire que, manifestement, je suis hanté par l’écriture depuis fort longtemps, mais une occasion me manquait pour avoir une tribune où la libre pensée était de rigueur.

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Passeport biométrique CEMAC
Crédit photo: https://ditengou.over-blog.com/

Mondoblog a donc été un déclic qui a réveillé en moi cet esprit. Petit à petit, je me construis mon monde, je partage mes convictions sous divers aspects de l’actualité nationale et internationale à travers les billets si médiocres soient-ils. En 7 mois (d’octobre 2013 à avril 2014) d’existence, je comptabilise plus de 40 billets environ. Ce qui me vaut l’honneur d’être invité via un message de l’équipe Mondoblog le 6 mars 2014 pour être parmi les bénéficiaires d’une formation en « Journalisme et en technique du web » qui aura lieu à Abidjan du 2 au 12 mai 2014. Subitement, je me rends compte que je n’ai même pas de passeport. J’étais en convalescence et j’estimais avoir le temps devant moi. Le 16 mars 2014, je reçois une lettre d’invitation pour la circonstance et je me résous, malgré ma convalescence, de me faire établir ce fameux sésame le plus tôt possible. Je contacte quelques aînés qui me donnent des conseils et des directives. Parmi eux, le Dr Shanda Tonme, président de l’ONG Comicodi (Commission indépendance contre la corruption et la discrimination) qui me fait sonner les cloches avec raison dans un courriel en ces termes : « Tu es encore derrière comme les fesses et j’ai peur que ton émergence n’arrive qu’en 2099. Bon, tout ce constat parce que personne ne comprendrait qu’un Charlot TK connu pour être un intello alerté et un citoyen avisé et moderne, ne dispose pas en permanence d’un passeport ». Non seulement ce message m’avait anéanti, mais c’était aussi et surtout une prémisse de ce qui allait m’arriver.

Le lundi 17 mars, habitant Douala, je suis en route pour la capitale Yaoundé après avoir pris rendez-vous avec Emile, un ami à mon frère aîné, qui est commandant à la Garde Présidentielle (GP) et qui accepte de me donner un coup de main pour accélérer le processus. Nous prenons la direction de l’Emi-Immigration où je reçois le soutien du commissaire. N’ayant pas les frais de timbre de passeport qui s’élèvent à 50 000 F fCa, j’avais pris le soin de contacter un ami une semaine avant qui me l’a promis pour la fin du mois. Comprenez donc qu’il ne pouvait compter que sur son salaire pour me sauver de la « fessée » mémorable de celui que je considère comme mon oncle, Shanda Tonme. J’ai fini de constituer tout mon dossier ce 17 mars et j’ai pris la route vers midi et demi pour Douala, ma ville de résidence avec la ferme conviction de revenir à la fin du mois.

Le 3 avril donc, je retourne à Yaoundé pour payer les frais de timbre pour ce fameux passeport. Mon invitation de RFI en main, je ne manque pas de faire un crochet dans le bureau du commissaire et ensuite de celui de son adjointe qui me donnent la certitude que mon passeport sera tout fin prêt dans deux semaines au plus tard. Je reste à Yaoundé pour attendre le 15 avril et retirer mon passeport. C’est avec cette sérénité que je répondais aux interpellations incessantes de Raphaëlle Constant et surtout de Manon Mella sur la situation de mon passeport en leur disant que tout sera fin prêt le 15 mars 2014. Connaissant assez bien ce pays, je ne doutais pas un seul instant que les paroles d’un commissaire pouvaient être mises en doute surtout pour une situation comme la mienne. Vraiment, j’étais loin de ne pas le croire. A la date du 15 avril 2014, rien ne pointe à l’horizon et je retourne à Douala puisque j’avais un rendez-vous avec mon médecin le lendemain, 16 avril 2014. Je suis resté stressé dans l’attente de ce passeport jusqu’au jour fatidique où le commandant Emile de la GP, à qui j’ai pris soin de laisser le reçu qui permet de retirer le passeport, m’appelle et me dit qu’il a envoyé mon passeport via l’agence de voyages « Buca Vouyage ». Nous sommes le 23 avril 2014, après 3 semaines d’attente. Très content de pouvoir enfin voyager, je cours rapidement à l’agence retirer le passeport. Après l’avoir retiré, j’ouvre l’enveloppe pour contempler le fameux sésame, je soupire après et j’arrête de respirer. Première page et hop, je constate que la photo n’est pas la mienne bien que toutes les autres infos sont exactes. Je reste immobilisé sur place pendant plus d’une heure me demandant ce qui m’arrivait compte tenu du temps qui me restait pour respecter le rendez-vous du 2 mai 2014 à Abidjan. Tout de suite, je renvoie le passeport au commandant Emile qui ne s’était pas rendu compte de l’erreur. Normal, puisqu’il me voyait pour la première fois le 17 mars dernier. Difficile donc pour lui de s’en rendre compte.

Le commandant Emile reconstitue un dossier pour rectification en joignant encore une fois de plus la lettre d’invitation de Mondoblog RFI pour accélérer le processus. Le lendemain, il revient pour prendre connaissance de l’avancement de mon dossier et patatras… Il se fait dire que la Sarcel entreprise chargée de confectionner les cartes nationales d’identité et les passeports camerounais, est en rupture de connexion internet provenant de Camtel (Cameroon Telecommunications). Du coup, la Sarcel ne pouvant plus avoir accès à mon fichier logé dans son serveur pour modifier ma photo, se trouve en arrêt total d’activité. Malchance ! Juste au moment où il faut me servir ? Ainsi, tout le week-end du 24 au 28 avril 2014, moi-même j’ai été victime de cette perturbation d’internet qui a été ressentie dans tout le territoire national. Je suis encore resté stressé jusqu’au 1er mai 2014. J’écris à l’équipe Mondoblog RFI pour annoncer mon échec. En réponse, Raphaëlle Constant m’encourage en me réconfortant et en me donnant une dernière chance. J’appelle mes collègues mondoblogueurs Ulrich Tadajeu Kenfack et Josiane Kouagheu qui expriment leur surprise. Normal ! On ne peut être que surpris. Ils m’encouragent sur mon initiative de me rendre sur place pour m’enquérir de la situation. Grâce à eux, je reprends mon courage à deux mains.

Je repars à Yaoundé dans la nuit du 1er mai 2014 et j’arrive dans la capitale autour de 4 heures le 02 mai 2014. Je vadrouille à la gare routière de Mvan pour attendre 7 h30, heure d’ouverture des bureaux. Le commandant Emile vient me rejoindre et me conduit partout : à l’Emi-Immigration, à la police des frontières, à l’ambassade de la Côte-d’Ivoire, à la Sarcel. Tout ceci pour trouver une issue qui pourrait me permettre de rejoindre mes collègues mondoblogueurs. J’ai même bénéficié des apports des amis, frère et sœur, Bergéline Domou et Mathieu Youbi qui ont essayé de dénouer l’écheveau de cette administration pour trouver une astuce qui pourrait me sortir de la galère. Face à cet échec, je retourne alors sur Douala où j’arrive autour de 23 h 30 le 2 mai et je découvre le message de Josiane qui s’inquiète et veut savoir ce qui se passe. Presque, en larmes, je lui réponds que je ne pourrai pas aller à Abidjan. Le lundi 5 mai 2014, une nouvelle me vient du commandant Emile selon laquelle l’entreprise Sarcel ne pourrait reprendre du service que vers le 15 mai 2014 ! Tout est bloqué. Tout est en panne. Dans quel pays ! Pour l’histoire, le passeport biométrique qui est en cours a été lancé le 19 août 2013 date de la cérémonie d’inauguration de la machine de fabrication capable de produire 1300 passeports par jour. Deux semaines après son lancement, cette machine était tombée en panne. Les techniciens avaient été dépêchés du Canada pour sa remise en service. La panne actuelle est donc la deuxième qui survient après 8 mois de sa mise en service.

A vrai dire ce n’est pas la formation qui m’intéressait. J’avais soif de cette chaleur humaine d’une diversité et d’une densité culturelles certainement humaniste et fraternelle. Sociologue de formation, je voulais vivre cette expérience qui n’est pas unique dans ma vie (je suis un habitué des rencontres initiées par les réseaux sociaux), mais qui est exceptionnelle par sa particularité : les francophones partageant l’amour pour l’écriture, le partage des idées, de la pensée, bref une rencontre de blogueurs, de libres penseurs se réunissant pour échanger. Voilà le challenge que je voulais relever. Hélas ! Les dieux de la technique ont décidé autrement, ajouté à cela de la désinvolture administrative, de l’incompétence notoire.

A travers donc ce billet, je transmets tous mes remerciements à l’équipe mondoblog RFI qui n’a pas cessé de booster mon moral pour avoir ce passeport. A mes collègues Ulrich et Josiane pour leurs encouragements. Mes salutations vont enfin à tous ces mondoblogueurs francophones présents à Abidjan pour qui je dois beaucoup d’admiration à travers la lecture de leur blog respectif. Beaucoup de blog m’ont enchanté et j’ai espoir qu’un jour, un jour nos plumes changeront quelque chose dans ces bêtises humaines que sont la désinvolture et l’incompétence qui tuent et annihilent le génie dont fait preuve la jeunesse africaine.

Complétez vous-même cette phrase : « Pour une histoire de passeport biométrique,… (…J’ai loupé Abidjan ; …Josiane n’a pas eu son chocolat ; …j’ai échappé aux fessées de Ziad sur mes fautes de grammaire et d’orthographe ; …j’ai raté le bisou de Manon ; etc.)

Tchakounte Kemayou 

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Commentaires

DEBELLAHI
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Ton absence est une perte pour tous. Toute mon amitié en ce moment de grande déception.

mamadou niang
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bonjour Tchakounte Kemayou rien qu'en lisant ce billet j'ai un pincement au cœur. Mais je t'encourage beaucoup. Tant qu'il y a la vie on peut toujours espérer...

Osman Jérôme
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Pour avoir connu presque un cas similaire l’année derniere, sans effort jte comprends bien ta frustration. En attendant que tu sois là l’annee prochaine, bonne continuité dans ton travail.

Yves Tchakounte
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@DEBELLAHI
Merci pour cette amitié qui me va droit au cœur!

Yves Tchakounte
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@mamadou niang
Bien sûr que je ne désespère pas, Mamadou Niang! Salut à toi!

Yves Tchakounte
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@Osman
Merci Osman pour ton soutien et ta sympathie. J'espère que la formation se déroule bien!

Joe Ndzulo
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Mon cher Kemayou, le meilleur reste à venir. Je retient de ton experience qu'il faut toujours être prêt. L'important c'est de rester motivé. Joli billet.

nathyk
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Assia, la prochaine fois sera la bonne. Continue à faire courir ta plume et à contribuer au changement des moeurs. Courage !