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« Panama Papers » en 5 étapes pour les nuls

Les médias internationaux, pour la plupart, d’origine européenne, font la une de leur tabloïd par ce qu’ils appellent « le scandale du siècle ». Celui-ci est déjà considéré comme la fuite d’information la plus spectaculaire de l’histoire des médias. Donc, une quantité d’infos 1000 fois plus florissantes et plus importantes que celles de Wikileaks et UBS Leaks. Le contenu de ces documents font la une des médias avec des révélations plus ou moins fracassantes et abracadabrantes.

« Panama papers » : voilà la nouvelle trouvaille des médias qui nous bousillent les tympans tous les jours. Considéré déjà comme le plus grand scandale de l’histoire des médias, le Panama Papers est devenu célèbre de par l’originalité et la quantité des informations issues des documents obtenus par le miracle du piratage, de la fuite, pour parler simple.

Ce scandale fait l’objet des publications diverses dans les médias à travers des révélations fracassantes et abracadabrantes, des explications, des interviews, des reportages, des analyses et des commentaires des plus complexes aux plus simples fusant de partout. Il existe donc milles raisons de perdre le lecteur, le téléspectateur ou l’auditeur au risque, au finish, de le décourager et de l’empêcher de s’y mettre assidûment. Car, un audimat assidu découvrira sûrement quelque chose de plus ou moins invraisemblable dans ce « scandale ».

Je vous propose ici trois série de billets. Ils répondent aux questions que les néophytes qui n’ont jamais entendu parler des concepts comme « société offshore », entre autres, murmurent en sourdine. Comme dans tous les domaines purement académiques, la mystification des concepts leur donne des sueurs froides. L’objectif ici est de démystifier les concepts qui font l’actualité des Panama papers afin de les rendre compréhensifs.

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1- Que veut dire Panama papers ?

– Définition

Il s’agit tout simplement d’une main malveillante qui a « piqué » et a mis à la disposition des journalistes des millions de documents révélant l’existence des sociétés qui engrangent d’énormes bénéfices à travers une fiscalité rusée et moralement condamnable. Ces documents sont appelés « Panama pepers » pour dire, en français facile, les papiers ou mieux les documents secrets provenant d’un pays : le Panama. La traduction littérale donne : « les papiers de Panama« .

– Contexte

Dans le site du Le Monde, le quotidien français , comme les 109 autres journaux à travers la planète, met à sa une, le dimanche 4 avril 2016, l’info dont le titre suscite la curiosité : « …Premières révélations des « Panama papers » sur le système offshore mondial ». Comment en est-on arrivé là ? L’affaire commence donc par une enquête que mène un journal allemand sur les accusations de fraudes fiscales dont la Commerzbank, la deuxième plus grande banque allemande, fait l’objet depuis un certain temps.

– Origine

En 2015, par une source anonyme, qui signifie en français facile « inconnue », le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung, puisqu’il s’agit de lui, a donc reçu, suite à ses investigations grâce à cette personne anonyme, une gigantesque masse de données de 11,5 millions de documents et de 2,6 téraoctets (2.600 Go) de données constitués de mails, des fax, des données statistiques et tableaux datant de 1977 à 2015. En prenant matériel, on peut se référer au calcule du site spécialisé Nakedsecurity. Selon ce site, en considérant que les 2,6 téraoctets de documents sont imprimés, cela représenterait au total une masse de plus de 13 tonnes de feuilles A4. Ce sont des archives de la firme panaméenne Mossack Fonseca qui s’exerce particulièrement dans la domiciliation (montage, création) des sociétés offshore. Évidemment, ces documents sont la propriété du cabinet dont le serveur a été piraté par une main malveillante. Cette personne anonyme a donc vendu ces documents aux journalistes allemands qui les a aussitôt mis à la disposition des autres à travers le mondes. Les informations secrètes révélant des indices de fraudes fiscales secouent tellement le monde à telle enseigne que mêmes les autorités fiscales allemandes, britanniques, françaises et américaines veulent s’en accaparer.

2Comment le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung a-t-il réussi à déchiffrer cette masse et ces milliers de données ?

Face à la multitude de la documentation, les journalistes de Süddeutsche Zeitung (le seul journal à avoir accès directement à la source de la fuite), se sont heurter à deux difficultés : les authentifier et les déchiffrer. Pour ce faire, le journal allemand n’avait ni les moyens humains, ni les moyens financiers de réaliser ces études. Il fait donc appel au Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), organisation à but non lucratif de droit américain créée en 1997. La ICIJ met à contribution tout son arsenal de plus de 110 rédactions disséminés dans 76 pays au total à travers le monde avec, au finish, 400 journalistes qui ont mis en tout 9 mois pour aboutir aux résultats que nous connaissons actuellement.

LICIJ, à travers son réseau de financement, mène de bout en bout l’enquête. Pour la gouverne, son mode de financement est basé sur la donation privée. Un tour sur le site de l’organisation nous donne une idée sur la liste et l’identité des organismes donateurs d’origine essentiellement anglo-saxon : le Pays-Bas (L’Adessium Foundation), le milliardaire américain George Soros (L’Open Society Foundations), le Royaume-Uni (Le Sigrid Rausing Trust, La Waterloo Foundation), la Norvège (La Fritt Ord Foundation) et les USA (Le Pulitzer Center on Crisis Reporting, La Ford Foundation, La David and Lucile Packard Foundation, Le Pew Charitable Trusts).

3De quelles informations dites « secrètes » s’agit-il ?

Au départ, les intentions des journalistes allemands étaient de savoir comment fonctionnent la fraude fiscale dans leur pays. Les contenus des documents qui vont au-delà de leur espérance révèlent des informations dignes d’intérêt et qui vont contribuer à peaufiner la lutte contre les évasions fiscales. Ces documents ont permis aux journalistes de découvrir l’existence de : 214.000 entités offshores; 21 paradis fiscaux différents; 205 pays concernés; 12 chefs d’État dont 6 encore en activités impliqués; 128 responsables politiques et hauts fonctionnaires impliqués; 29 membres du classement Forbes parmi les 500 personnes les plus riches du monde impliqués.

Les infos contenues dans ces documents stipulent que les personnalités issues des milieux politiques, économiques et sportifs ont créé des sociétés offshore au Panama. Ces sociétés étant considérées comme des sociétés écran (des prêtes-noms et des noms au porteur), on estime alors qu’on a affaire à des personnes de moralité douteuse.

4- Pourquoi ce scandale ne concerne-t-il que le Panama ?

Ce qui a motivé le quotidien allemand sur la piste de cette banque commercial, c’est le paiement de l’amende de 17 millions d’euros que lui a infligée le fisc en octobre 2015 pour avoir aidé ses clients à frauder avec le concours du cabinet financier Mossack Fonseca qui se trouve, malheureusement ou heureusement, au Panama. Les journalistes allemands, enquêtant sur cette affaire de fraude fiscale, se sont retrouvés sur la piste d’une source qui a « piqué » des millions de données. C’était donc au-delà de ce qu’on attendait d’elle.

Il se trouve aussi que, semble-t-il, le Panama est le seul pays au monde à avoir refusé de signer les accords de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE). Cette dernière raisons expliquerait donc le fait que ces pays à fiscalités avantageuses, sont considérés comme des paradis fiscaux, législatifs et réglementaires caractérisés par « l’opacité ; la fiscalité très basse, voire nulle ; des facilités législatives pour créer des sociétés-écrans ; l’absence de coopération avec les administrations fiscales, douanières et/ou judiciaires des autres pays ; la faiblesse ou l’absence de la régulation financière » (Libération).

5- Quelles sont les personnalités impliquées ?

Quelques noms pour montrer l’ampleur des dé dégâts, ont été révélés par Cameroon Tribune : « Dans le monde politique, douze chefs d’État dont six encore aux affaires sont mis en cause.

Dans le monde de la politique, dans cette liste non exhaustive, figurent Nawaz Sharif, Premier ministre pakistanais, le roi Salman d’Arabie saoudite, le président ukrainien Petro Porochenko, son homologue argentin Mauricio Macri, le président chinois Xi Jinping. Des proches du président russe, Vladimir Poutine, à l’instar du violoncelliste Sergueï Roldouguine, parrain de l’une de ses filles sont cités.

En Afrique, les noms des présidents Jacob Zuma et de Joseph Kabila sont cités. Ainsi que celui du fils du président congolais, Denis Christel Sassou Nguesso, surnommé «Kiki le pétrolier».

Dans le monde du sport, Lionel Messi et Michel Platini et le nouveau président de la FIFA sont évoqués. Une vingtaine d’autres stars du FC Barcelone, du Real Madrid et de Manchester United en font partie ».

Question subsidiaire en guise de conclusion :

Pourquoi les Américains sont-ils absents dans cette liste ?

L‘un des médias partenaires de cette vaste enquête, le magazine américain Fusion, a eu à relever au total 211 noms avec une adresse localisée aux États-Unis. Le hic est que, d’une part, plusieurs d’entre eux sont des « prêtes-noms » ou des « noms au porteur » et d’autre part, rien ne prouve qu’ils sont Américains ou des résidents contribuables aux USA. Cette faible représentativité des noms américains suggère les hypothèses selon lesquelles : 1- les Américains préféreraient le cabinet Morgan & Morgan plus que celui de Mossack Fonseca, et 2- les Américains préfèrent solliciter des cabinets situés dans les États Américains comme le Delaware, le Wyoming ou le Nevada pour créer leurs sociétés offshore. Selon le quotidien Le Monde, « ils sont considérés comme des paradis fiscaux. Ils permettent de cacher le bénéficiaire d’une société à travers une structure opaque, tant que celle-ci n’a pas d’actionnaire américain ni d’activité aux États-Unis ».

Cette réponse ne semble pas satisfaire certains observateurs avertis sur les véritables intentions de cette vaste fuite. Un doigt accusateur pointe les USA qui est en train d’utiliser routes les stratégies géopolitiques pour son positionnement mondial.

A la suite de la publication des noms des personnalités, les têtes commencent déjà à tomber. Le non moins célèbre Sigmundur David Gunnlaugsson, premier ministre Islandais en a appris à ses dépends en démissionnant à deux jours seulement après la publication de la fameuse liste. Mais, que reproche-t-on exactement à ces personnalités ? Un nom figurant dans la liste des « Panama papers » signifierait-il que le concerné est coupable de quelque chose ? Si oui, de quoi s’agit-il ?

La réponse à ces interrogations se trouve dans le système de fonctionnement des sociétés offshore développé dans le billet suivant intitulé : « Société offshore en 5 étapes pour les nuls ».

Tchakounté Kémayou

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Auteur·e

tkcyves

Commentaires

kaptue florian
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bonne documentation