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La question du statut de la femme africaine : quel regard ?

Le 08 mars de chaque année la Femme est célébrée dans le monde entier à travers ce que l’ONU appelle par un slogan marketing « Journée Internationale de la femme ». Le thème de cette année est intitulé « L’égalité pour les femmes, c’est le progrès pour toutes et tous ». Le Cameroun n’étant  pas en reste, se joint aussi à l’ONU pour célébrer la Femme en rendant publique son thème de la journée qui est intitulé « Défis et réalisations des objectifs du millénaire pour le développement des filles et des femmes ». Il convient ici de remarquer la portée de ces deux thèmes qui soulèvent implicitement ou explicitement les problématiques de progrès/développement et égalité. Concepts si chers au développement dans un contexte africain en ces temps modernes. Cela m’amène donc à me poser la question de savoir ce que représente la femme africaine. Le statut de « sous-développement » et « d’inégalité » qui persiste dans notre société sont-ils le fait de la « déshumanisation » de la femme ou alors l’on considère la femme comme le levier de la modernisation de notre société ?

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La Femme comme servante

Cette conception de la femme en tant que compagnons servante de l’homme est encore plus répandue dans l’opinion des mâles et de certaines femmes. A titre d’illustrations, c’est la femme qui se lève tôt à 04 heures le matin, elle se met à la tâche ménagère et est la dernière à dormir. Parfois, c’est aux environs de 22 heures ou minuit qu’elle peut rejoindre son lit. Ceci après une rude journée de dures tâches de maison. Sa tâche commence d’abord par les enfants qu’il faut apprêter pour l’école : les laver, les habiller, leur servir le petit déjeuner, les accompagner à l’école non sans avoir donné les conseils aux bouts de chou sur l’environnement scolaire de plus en plus hostile. Monsieur le mari, pour garder la bonne humeur doit avoir son repas du bas-ventre avec sa femme dès 5 heures du matin avant de passer à table pour le repas du ventre avec les enfants. Il prend donc la route du boulot pendant que madame accompagne la progéniture à l’école. Elle reste donc seule à la maison pour s’occuper des tâches ménagères que la société a tôt faites de considérer cette occupation comme une profession. Elle lave, elle blanchit, elle cuisine, elle jardine, elle repasse, elle fait le baby-sitter, elle fait des commissions, elle garde la maison et que sais-je encore ? Beaucoup d’africains et plus particulièrement de camerounais comme moi ont eu comme « profession de la mère : ménagère » dans leurs diverses pièces officielles. Curieusement, c’est la seule « profession qui reste jusqu’à nos jour reconnue et officielle mais qui n’a pas de statut. Pour preuve, quelle est le salaire de nos mamans appelées pompeusement « Ménagère » ? Evidemment, l’opinion africaine considère ce statut de la femme comme « normal ». Son « rôle » c’est de rester à la maison, de servir de partenaire sexuel de l’homme et d’éduquer les enfants.

Il devient, de nos jours, tout à fait absurde d’avoir une conception de la femme sur le schéma décrit ci-dessus. La mondialisation et tout ce que cela comporte comme effets secondaires est venue remettre en question, dans un contexte de pauvreté, cette conception africaine sous le prisme du développement et du progrès. La première critique formulée à la conception de la femme ménagère est l’asservissement et la déshumanisation de la femme en la réduisant à une servante. La deuxième critique relève du fait que cette conception avait pour effet négatif de considérer la femme comme « la remplaçante » de l’homme et non comme « la compagne » ou « la complémentarité » de l’homme. Cette conception africaine et camerounaise a créé sa propre mort devant la poussée de la mondialisation. Celle-ci est donc venue avec des concepts innovants comme « l’égalité » entre l’homme et la femme.

L’émancipation de la femme africaine

La problématique de l’émancipation de la femme est donc le fait d’une culture de la conscience collective de la déshumanisation de la femme par les hommes en Afrique. Les raisons pour lesquelles les femmes sont considérés comme telles sont légion. La population étant considérée comme un marché potentiel dans un contexte de la mondialisation, la femme devient un objet marketing. Il devient donc nécessaire d’influencer l’opinion collective par le concept d’égalité homme/femme en considérant par exemple que la femme n’est pas née pour être « ménagère », elle peut aussi « travailler » comme l’homme et se prévaloir des droits et devoirs conférés à ce statut. Du coup la question qui se posait sur la paternité des tâches ménagère se pose et il devient donc légitime de les imputer aussi à l’homme. Il devient, en ce moment difficile de faire la nuance entre la responsabilité de l’homme et de celle de la femme dans le cas où celle-ci n’exerce aucune activité professionnelle. Quelle sera maintenant le statut de la femme en ce moment-là ? Celle-ci va-t-elle rester « ménagère » comme je l’ai démontré plus haut ?

Le concept de féminisme ne tombe pas du ciel comme un cheveu dans la soupe. Dans le contexte de mondialisation, la femme est devenue un objet de marketing sous plusieurs aspects : planning familial. Je me suis toujours posé la question sur le sens du financement de planning familial par la Banque mondiale. Est-ce pour le bien-être de la femme qui revendique ce droit de décider en toute âme et conscience le moment propice pour elle de concevoir ? Soit. Il serait tout de même absurde de refuser à la femme le droit de prendre une décision utile pour son bien-être. Cependant, peut-on par-dessus tout considérer la problématique de la guerre du nombre comme moins importante que le bien-être de la femme ? Autrement dit, la guerre du contrôle de la population mondiale dans le monde où la croissance des populations non européennes vécue en Occident comme une menace géostratégique est-elle moins à considérer que le bien-être de la femme ? Cette idéologie sur le fait que la population africaine et en particulier camerounaise est trop nombreuse n’est-elle pas utopique ? Elle est même, à la limite, une baliverne. Du coup, je peux comprendre le pourquoi de cette notion d’égalité homme/femme si chères aux féministes engagées.

Le contexte de pauvreté n’est pas pour faciliter la compréhension non plus. L’homme qui allait au boulot tôt le matin est considéré comme chef de famille. Détenteur de pouvoir d’achat, il est de ce fait considéré comme un homme puissant, donc, celui qui a le destin de la famille entre ses mains. Le chômage élevé de l’homme est donc signe que le glas a sonné pour lui. Du coup, la donne change et la femme se voit nantie d’un devoir de survie de la maisonnée. Elle est alors livrée aux petits commerces de la rue et de la trié appelé vulgairement au Cameroun « bayam sellam ». Ce pouvoir financier dévolu aux hommes change de mains. La question d’égalité homme/femme trouve son pesant d’or. La femme revendique alors cette « place » qui est la sienne et que l’homme occupe illégalement. Au fait, de quelle « place » s’agit-il ? Certainement de la compagne jadis peut-être jamais reconnue par la société pourtant le statut de ménagère ne lui a jamais été reconnu.

Il s’agit ici de reconnaitre que la femme est un être humain qui doit jouir des mêmes droits et devoirs que les hommes. Cette conception selon laquelle la femme est la maîtresse de la situation économique de la famille n’est pas fortuite. Elle est belle et bien un construit idéologique qui a pour objectif de donner à la femme des convoitises injustifiées et injustifiables. Les critiques apportées à la conception de la femme africaine sont justifiées. Il faut aussi le dire sans ambages, cette conception de la femme africaine décrite plus haut est trop biaisée et bafouée par le fait de l’esprit de domination exacerbée de l’homme africain moderne dit « civilisé » qui a réduit la femme à une servante. L’Afrique a toujours, et ce depuis des lustres, considéré la femme comme le centre de l’univers car mamelle nourricière de l’humanité. Pour preuve, d’où vient-il que dans notre génération la femme doit porter le nom de son mari alors que nos mères et grand-mères portaient ou portent leur propre nom?! Il serait donc injustifié que la conception de la femme africaine soit dénouée de tout son sens pour donner à la femme la place qui n’est pas la sienne.

Bonne fête mesdames !

Tchakounté Kemayou (TKC_YVES)

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tkcyves

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